Cocu-soumis

 

Sans argent, sans papier, sans téléphone, je peux vous assurer qu’on se trouve bien démuni aujourd’hui. Pour la première fois de ma vie, j’ai pris le métro sans payer… Moi Charles de la Sauverie (nom fictif), grand bourgeois s’il en est, cadre sup d’une grande boîte de la Défense, j’en suis réduit à sauter au dessus du portique et guetter les issues de peur d’être contrôlé. J’ai basculé dans une autre dimension, j’ai l’impression d’avoir changé de vie. J’ai échangé le confort d’une vie bourgeoise contre la précarité d’une vie de roture et de galère. Mais malgré mon inconfort, s’il n’y avait cette peur de perdre mon épouse, je dois avouer, sans pouvoir le comprendre pour autant, que le fait d’avoir été chassé de chez moi par ma propre femme a quelque chose d’excitant. Je me remets en question, mais les réponses que j’apporte me font honte : je suis excité par la soumission, la colère de Déborah m’a beaucoup plu, me retrouver à ses pieds et être giflé m’a fait bander tout à l’heure. Je suis un pervers qui se croyait obsédé par la sodomie et qui se découvre soumis.

C’est dans cet état d’esprit, celui d’un homme brisé et soumis, que je me présente chez Lila. Je ne sonne pas à sa porte parce que je suis à la rue (enfin si un peu quand même), je sonne parce que ma femme m’en a donné l’ordre : « Va rejoindre ta pute… Va passer la nuit chez elle, je ne veux plus de toi chez moi. »

Lila est plus que surprise de me voir débarquer chez elle, mais après lui avoir expliqué ce qui s’était passé après son départ, elle se montre attentionnée, compatissante et douce. Le tact et la gentillesse dont elle fait preuve à mon égard, s’accordent à merveille avec ma docilité. Je suis totalement désorienté et j’accepte tout. Je l’écoute, je l’approuve, je dîne quand elle me dit de dîner, je me douche quand elle me dit de me doucher, je me couche quand elle me met au lit…

Le lendemain, Lila me dépose près de chez moi, et j’intercepte ma femme lorsqu’elle quitte notre appartement. J’espère seulement qu’elle ne va pas me faire une scène.

 

Charles

 

Je m’attendais à ce que Charles m’accoste en bas de chez moi, je ne suis pas surprise, il a besoin de se changer, de ses papiers, de son portable, il doit aller travailler. J’ai pensé toute la nuit à cette confrontation, je sais comment le cueillir, pas l’accueillir… Le cueillir…

 

- Chérie, j’ai besoin de monter à l’appartement avant d’aller travailler… commence-t-il d’un air intimidé. (Son manque d’assurance convient parfaitement à la suite que j’ai prévu de donner à cet entretien, mais je ne dis rien, afin de l’obliger à me faire de nouvelles excuses et lui montrer que la nuit ne m’a pas rendu plus indulgente). Ecoute, je ne te demande pas de me pardonner, mais tu comprends que je dois aller travailler… Je t’en prie.

 

Je garde le silence mais je fais demi tour pour le raccompagner. Une petite surprise l’attend une fois dans l’appartement.

 

- J’ai décidé de demander le divorce, dis-je en refermant la porte derrière moi d’un air menaçant.

 

Charles blêmit. Une vraie descente de mine, mon premier effet est réussi.

 

- Déborah, je t’en prie, prend le temps d’y réfléchir…

 

- J’ai eu la nuit pour y réfléchir.

 

- Je ferai ce que tu veux mais ne divorçons pas !

 

Voilà ce que je voulais entendre… Premier cap de notre entretien franchi avec succès et rapidement, c’est encourageant pour la suite. Je gagne en assurance, et part m’asseoir dans le canapé derrière nous.

Charles veut s’asseoir en face de moi mais je le coupe dans son élan.

 

- Non, reste debout ! Pour ce que j’ai à te dire, tu restes debout.

 

Il obéit, je marque un nouveau point, il est, je le sens, disposé à tout accepter…

 

Déborah

Sam 21 mar 2009 1 commentaire
Hmmmm...très bien cet épisode, j'aime beaucoup le côté calculateur et réfléchi de Déborah, en parfait décalage avec Charles, perdu et débordé.

Voilà l'intérêt de l'écriture à quatre mains à mon avis, bravo et vivement la suite!
Lord2A - le 23/03/2009 à 17h27