Je suis un masochiste qui refoulait ses pulsions, un soumis qui ignorait son désir de soumission, un esclave qui n’attendait que sa Maîtresse. Jamais je n’aurai pu imaginer un instant que cette Maîtresse puisse être ma femme. Mais en toute franchise, jamais je n’avais fantasmé sur la soumission avant ce jour. Et pourtant j’aime ça. Depuis le début de la journée, je suis mon épouse comme un petit chien bien dressé, j’accède à toutes ses demandes, cède à toutes ses exigences. Jamais je n’ai fantasmé sur la soumission ou l’humiliation et aujourd’hui j’en découvre toutes les saveurs. Je comprends mieux que quiconque le sens du mot « refoulé » : aimer sans savoir que l’on aime ça.
Nous pénétrons dans le sex shop après avoir arpenté deux fois la rue saint Denis, un peu hésitant, un peu honteux. Je n’ai jamais mis les pieds dans un telle boutique, nous choisissons celle qui nous semble être la moins « mal famée ». Je remarque que Déborah n’est pas très à l’aise non plus, elle ne me demande plus de marcher derrière elle comme un majordome ou un porte serviette.
- Allez vas-y ! Entre !
Je pousse la porte et nous voilà dans l’enfer de la débauche. Un mannequin attire mon attention dans une vitrine sur le côté. Il est harnaché de lingerie en cuir et met en évidence des gadgets tous plus grotesques les uns que les autres : une énorme planche à fessée (j’apprendrai bientôt qu’il s’agit d’un paddle), un gode à forme bizarre (j’apprendrai aussi bientôt qu’il s’agit d’un plug), des pinces fixés sur ses tétons de femme en plastique, et pour couronner son air grotesque un visage grossièrement maquillée sur lequel on a omis de placer une perruque.
Il ne s’agit que d’une mise en bouche, nous sommes dans un vestibule minuscule, fermé d’un épais rideau pourpre. Je le pousse, je veux m’effacer pour y laisser pénétrer ma femme en premier, mais elle me fait signe d’entrer d’abord, signe à mon sens, qu’elle n’est pas dans son élément. Pour elle aussi, c’est la première fois. Et ce lieu est rarement fréquenté par les femmes. Cette idée reçue m’est confirmée une fois à l’intérieur. Il y a 4 clients, tous des hommes, et tous se retournent sur Déborah. Tous marquent à leur façon leur étonnement, par un regard, un sourire ou petit rictus d’envie. Il faut rappeler que ma femme est vêtue d’un tailleur très sexy, et perchée sur de jolis escarpins. Elle correspond en tout point à l’image qu’on se fait de la « bourgeoise sexy », je relève tout de suite l’affiche qui nous fait face et qui montre une blonde plantureuse, en tailleur BCBG mais seins à l’air en train de tailler une pipe, le titre évocateur me met très ma à l’aise : « bourgeoise en chaleur ».
Ma femme est elle cette bourgeoise en chaleur ?
Charles
Mon cher époux, certes nous écrivons ce blog à quatre mains, mais il va falloir perdre cette habitude un peu lassante de finir tes billets par une question. La ficelle est grosse, elle te permet une chute un peu trop facile à mon goût. Je ne répondrai pas à cette question dont tu connais d’ailleurs la réponse.
Tu as raison néanmoins de dire que je ne suis jamais entrée dans un sex shop avant ce jour et que je suis particulièrement mal à l’aise. Mieux, j’avouerai que les premières minutes sont pesantes, bref que je n’en mène pas large. La boutique me parait un peu crasseuse, exigue et les types qui me lancent des œillades libidineuses ne sont rien d’autre que des pervers. Il n’y a guère que ce petit jeune dans un coin de la boutique qui semble aussi gêné que moi. C’est vers lui que je me dirige. Il est en train de reluquer des vidéos sado maso. Avec son air timide et effarouché, je jurerai qu’il est soumis. Mais pas autant que mon mari qui m’a donné des gages de soumission impressionnants depuis ce matin. Je tends à Charles une vidéo où l’on voit un homme en train de recevoir une fessée sur les genoux d’une maîtresse en cuissardes.
- Regarde, le cul de ce type comme il est rouge ! Elle ne fait pas semblant la petite dame, tu crois que tu pourras endurer une fessée pareille ?
Je parle assez fort pour que le petit jeune à côté m’entende, son malaise me touche, et me libère peu à peu de ma propre gêne. Je veux qu’il sache que mon mari est comme lui, et qu’il a à ses côtés, l’incarnation de ses fantasmes : une maîtresse en chair et en os… Oui, c’est ce que je suis désormais. Il me faut juste me documenter un peu sur le sujet et je suis dans le lieu idéal pour cela. Bien sûr je ne vais pas oublier mes chers sex toys pour satisfaire mes plaisirs solitaires, mais il me faut aussi de quoi dresser mon nouvel esclave.
Il y a une table au milieu du magasin qui attire mon attention. Elle est encombrée de gadgets, de godes, et de martinets, comme s’ils étaient déposés là en vrac. J’hésite à les observer de plus près, mais si je le fais je vais dévoiler mes penchants et mes fantasmes les plus intimes aux hommes présents autour de moi. Les clients tentent de me reluquer plus ou moins discrètement, mais le gérant nous ignore superbement, blasé qu’il doit être. Je passe en revue les jaquettes explicites en attendant de me décider à fouiller tous ces curieux gadgets qui trônent au milieu de la salle. « Secrétaires vicieuses », je suis en face du rayon qui montre des jeunes femmes en tailleur Harmani se faire prendre par leurs patrons autoritaires. Vêtue comme je suis, je corresponds parfaitement à l’archétype de cette secrétaire en train de se faire sodomiser par son directeur des ventes, sur le bureau. La vidéo me fait l’effet d’un repoussoir. Je la repose et je me dirige enfin vers la table qui attise ma curiosité depuis que je suis entrée. Au diable ces hommes qui m’observent ! Au diable ce reste d’éducation bourgeoise qui me maintient dans un état de honte et de culpabilité ! C’est mon mari que je vais humilier, c’est sur lui que je vais reporter ma propre honte. Je me saisis d’une paire de menottes et les lui mets sous le nez en souriant d’un air moqueur.
- Tiens regarde les belles menottes. Je vais les prendre, comme ça quand je m’absenterai de la maison, je t’attacherai avec, tu ne pourras pas te tripoter quand je ne serai pas là.
Charles se met à rougir de manière incroyable. Il ne s’attendait pas çà ça. Je suis moi-même surprise par mes propos. Mais d’un coup, je me sens désinhibée.
- Oh et regarde moi ça ! (Je me saisi d’un harnais muni d’un gode, j’ignorais à ce jour que des godes ceintures pouvaient exister). Est-ce bien ce à quoi je pense ?
- Ce sont pour des lesbiennes, tente de m’expliquer mon mari à voix basse.
- Moi, je crois que ça peut aussi servir pour les hommes, répondis-je avec malice. Les hommes qui fantasment sur la sodomie, les hommes qui méritent de se faire prendre par derrière, des hommes comme toi. Allez, hop on le prend !
Charles se décompose. Il va chercher un petit panier devant la caisse du gérant et y place le gode ceinture avec les menottes.
- Ajoutes-y les vidéos de fessées et de soumission qui sont derrière toi, ça devrait me plaire et me donner des idées pour te dresser.
Il y a un vieux pervers qui ne se gêne plus désormais pour me regarder avec lubricité. Il a entendu mes propos et peut être que cela le fait fantasmer. Je commence à me détendre. Je me saisis de quelques vibros rigolos et les mets dans le panier de mon mari, puis je suis attirée par des godes aux proportions monstrueuses. Comment est-ce possible ? Puis je vois toute une série d’instruments de torture. Je me saisis d’une cravache, la tord entre mes mains, la fait siffler. Cette fois, tout le monde me regarde, même le gérant blasé qui est en train de se demander si je ne vais pas fouetter mon mari sous ses yeux. Je ne peux m’empêcher de rougir. Je sens le feu me monter aux joues. Je me détourne pour fuir ces regards libidineux, mais je ne lâche la cravache et le martinet que pour les déposer au fond du panier de Charles. J’y ajouterai avant de partir un plug, des pinces, des revues, et bien d’autres jouets érotiques qu’il me tarde d’essayer.
Déborah
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